L'addiction ... comment y remédier ???

Marie de Noailles, psychothérapeute et addictologue, travaille au sein du cabinet d’addictologie Acte now . Ce dernier propose des solutions individuelles et collectives pour rompre avec la dépendance aux jeux. Explications.


- Comment devient-on un addict du jeu en ligne ?

Tout d’abord, il faut savoir que la dépendance aux jeux de paris est considérée comme une pathologie depuis 1980 par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé). On considère qu’une personne devient dépendante lorsqu’elle dépense plus de 10% de son revenu mensuel dans les jeux (casino, poker, PMU…). Après, il faut voir dans l’addiction au jeu le même processus de destruction que dans un autre produit. Le problème est le même entre un homme qui ment à sa femme alors qu’il va faire une énième partie de poker avec ses amis et un autre qui va aller boire de l’alcool dans un bar alors qu’il devait aller promener le chien.


- A combien estime-t-on le nombre de joueurs addicts en France ?

Selon les chiffres officiels, il y aurait 1% de la population française qui serait touchée par l’addiction aux jeux de paris. Ce qui représente, environ, 650.000 personnes.


- Internet est-il l’un des principaux responsables de cette dépendance ? Et l’ouverture à la concurrence va-t-elle conforter cette tendance ?

C’est difficile à dire. Peut-être qu’il y a un risque que des jeunes joueurs tombent plus facilement dans l’addiction à travers Internet. Mais je ne pense pas que l’ouverture des jeux en ligne soit réellement un problème même si je suis convaincue que certains addicts au jeu vont se révéler à travers cette nouvelle forme de consommation. Un peu à la manière des dépendants au sexe qui me parlent souvent d’Internet comme terrain de jeu.


- Quelle est la méthode d’ Acte Now pour prendre en charge un dépendant aux jeux de paris ?

Nous considérons une addiction comme le symptôme de quelque chose de plus profond. On peut donc aider une personne avec uneaddiction aux jeux de paris de la même manière que quelqu’un qui a une autre addiction comportementale. Nous avons un panel de solutions selon les degrés de dépendance. Pour les plus gravement impliqués, on peut envoyer ces personnes dans des centres résidentiels qui traitent l’addiction quelle qu’elle soit. Pour les autres, on fait de la thérapie de groupe qui fonctionne souvent bien, mais également individuelle. Nous conseillons également fortement à nos patients de participer à des groupes de paroles à l’extérieur du cadre thérapeutique. Nous pensons qu’il n’y a pas mieux qu’un addict pour en aider un autre. L’entraide est fondamentale.


- Vos spécialistes doivent-ils posséder des compétences spécifiques pour le suivi des joueurs ? Si oui, lesquels ?

Mes associés et moi-même avons des compétences qui enveloppent les addictions dans leur globalité. Personnellement, j’ai reçu un Master en sciences de la psychologie de l’addiction en Angleterre ce qui m’a permis d’acquérir des notions de psychologie, notamment sur le jeu.


- Les femmes sont de plus en nombreuses à jouer en ligne, notamment au poker. Sont-elles plus sujettes à la dépendance que les hommes ?

Dans les statistiques générales de l'addiction, les hommes sont plus sujets à la dépendance que les femmes. Après, nous manquons de recul sur le problème des femmes. Sont-elles plus vulnérables si elles jouent à des jeux d’argent sur Internet dans le seul but de tuer le temps ? Je ne sais pas. Ce qui est plus sûre, c’est qu’elles consomment le jeu d’une autre manière que les hommes. Par exemple, si on prend l’exemple de l’alcool, les femmes vont plus boire à l’abri des regards que leurs pendants masculins. Le tabou est réel.


- Enfin, ne trouvez-vous pas qu’il y a beaucoup d’hypocrisie chez les opérateurs de jeux en ligne ? A la fois, ils proposent des conseils pour lutter contre la dépendance tout en incitant les joueurs à venir parier…

Tout à fait. C’est exactement le même problème avec l’alcool ou le tabac. L’Etat va dépenser des millions d’euros pour faire de la prévention alors que les entreprises vont, dans le même temps, faire de la promotion. Ceci étant, contrairement aux drogues, le jeu en ligne peut être quelque chose d’agréable et d’excitant si on est raisonnable. Même si tout n’est pas parfait, je pense que l’Etat a fait des efforts pour lutter contre les addictions. Ces dernières sont tellement démocratiques qu’elles sont difficilement contrôlables.


Stéphane Pocidalo




Source : http://www.acte-now.com